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jeudi 30 mai 2013

Opération Scotland Yard - Sapphire, Basil Dearden (1959)


Une jeune femme, Sapphire, est retrouvée assassinée dans un parc de Londres. L'inspecteur Hazard est charge de l'enquête. Il découvre que cette fille discrète, fiancée à un architecte, menait une double vie, sous deux identités et deux couleurs de peau.

Sapphire est un très bon polar où Dearden aborde le racisme ordinaire régnant alors en Angleterre en traitant du phénomène du passing. Le passing est l'action par laquelle des noirs à la peau très claire profitèrent de cette particularité physique pour s'intégrer aux milieux blancs notamment aux Etats-Unis. Le cinéma s'était penché sur ce thème avec bien sûr le chef d'œuvre de Douglas Sirk Mirage de la Vie (1959) et en littérature Boris Vian signa son fameux J'irai cracher sur vos tombes en 1946. Dearden à travers le remarquable scénario de Janet Green dépeint ainsi une Angleterre d'après-guerre refermée sur elle-même et où règne la peur de l'autre.

Le film s'ouvre sur la découverte macabre du corps d'une jeune femme dans un parc londonien. L'intrigue déroule donc au départ une construction policière classique l'enquête de L'inspecteur Hazard (Nigel Terry) et Learoyd (Michael Craig) survole le passé de la victime, sonde ses amis et son environnement. Des signes précurseurs (une garde-robe secrète aux tenues bien plus criardes et voyantes que la sobriété de façade) annoncent la révélation qui remet tout le récit en question avec la découverte du frère de Sapphire, noir. Sapphire pratiquait donc le passing et dès lors de son petit ami blanc et sa famille en passant par la communauté noire londonienne, les suspects se multiplient selon leur intolérance et le fait qu'ils soient au courant du subterfuge de Sapphire.

Plus que l'enquête, c'est réellement l'étude de mœurs qui intéresse là Dearden qui nous fait découvrir un Londres interlope et multiracial rarement vu jusque-là, la bande-son jazzy de Philip Green nous promenant de bar dansants enfumés en squats insalubre. La division est pourtant claire avec l'autre Londres plus blanc, séparation que Dearden affiche une séquence au saisissant surréalisme urbain lorsqu'un suspect noir traqué par la police fait face à la haine et menace au fil de brèves rencontres nocturnes (même si la dernière plus bienveillante atténue l'impression) où sa couleur ne fait vraiment pas de lui le bienvenu.

Nigel Terry promène son flegme impeccable face aux personnages plus outrés qui l'entourent, sa neutralité contrastant avec l'intolérance présente chez les noirs comme les blancs. Dearden évite aussi le piège du racisme involontaire avec certains noirs exubérants et caricaturaux (mais signe d'un certain comportement existant) contrebalancé par d'autres plus posés et réfléchis comme le frère joué par Earl Cameron.

Les blancs ne sont de même pas tous des racistes belliqueux mais la réalité d'une vraie discrimination nous apparait le temps de séquences presque documentaire (la tenancière d'hôtel refusant l'entrée d'un noir pour ne pas perdre sa clientèle, un bar se levant comme un seul homme à l'entrée d'un noir...).

C'est dans ce rejet viscéral de l'autre que la puissante scène finale nous révèlera le coupable dans une tension étouffante. Une belle réussite dont le message progressiste marqua l'opinion si l'on en croit les récompenses obtenues avec un BAFTA du meilleur film et une nomination pour le script de Janet Green. Dearden prendra encore plus de risque deux ans plus tard en dénonçant le chantage envers les homosexuels dans le thriller Victim (1961).

Sorti en dvd zone 2 anglais sans sous-titres 

Extrait

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