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lundi 9 juin 2014

Les Tribulations d'un Chinois en Chine - Philippe de Broca (1965)


Arthur, jeune milliardaire blasé, semble s'ennuyer, mais se retrouve ruiné sur un coup du destin. Son précepteur lui conseille de prendre une assurance vie au profit de sa fiancée et de lui même. Arthur va être victime de nombreuses tentatives de meurtre, et en oublie sa déprime.

Après le triomphe commercial de L'Homme de Rio (1964), une suite en est bien évidemment attendue mais Philippe de Broca craignant d'être catalogué s'y refuse. A la place il préfèrera retrouver son premier double cinématographique Jean-Pierre Cassel dans Un monsieur de compagnie (1964), poursuivant l'esprit de leur brillantes collaboration sur Les Jeux de l'amour (1960), Le Farceur (190) et L'Amant de cinq jours (1961). Le film sera malheureusement un échec commercial, forçant le réalisateur à revenir à au registre de L'Homme de Rio.

Plutôt qu'une suite, De Broca préfère très librement adapter le roman de Jules Verne Les Tribulations d'un Chinois en Chine où il intégrera tous les éléments du succès initial, retrouvant Jean-Paul Belmondo, le producteur Alexandre Mnouchkine et bien sûr son scénariste Daniel Boulanger. Seul absent de taille Jean-Paul Rappeneau qui avait pourtant eu un rôle majeur par sa rigueur narrative coutumière dans la construction parfaite de L'Homme de Rio. Film signé à contrecœur, Les Tribulations d'un Chinois en Chine sera une redite du succès de 1964 où tout est repris dans un excès indigeste : plus de moyens, plus d'exotisme, plus de cascades, plus d'humour nonsensique. Il manque cependant l'essentiel, l'implication.

La réussite de L'Homme de Rio était une affaire d'équilibre. Les courses poursuites endiablées étaient entrecoupées des respirations comico-romantique entre Jean-Paul Belmondo et Françoise Dorléac. Les méchants grotesques prêtant à rire était contrebalancé par un Jean Servais glaçant qui ramenait le tout à un premier degré où le danger et l'imprévu continuait à guider l'aventure. Il en va de même pour les cascades où les exploits reposaient avant tout les capacités physiques exceptionnelles de Belmondo. Ici tout est placé à l'aune de l'excès et de la surenchère hystérique qui lasse rapidement le spectateur. L'enjeu moins "concret" que L'Homme de Rio (un sauvetage et une chasse au trésor) méritait pourtant un traitement plus subtil avec ce héros milliardaire suicidaire qui en orchestrant sa propre mort va retrouver gout à la vie.

Belmondo parait bien désintéressé par cet enjeu dramatique, exprimant le mal être du personnage en tripotant sa mèche de cheveux et en adoptant des moues affectées. Il est bien sûr plus convaincant dès qu'il est dans le mouvement mais le rythme infernal du film en fait plus un pantin désarticulé qu'un personnage auquel on s'attache et dont on a envie de suivre les aventures. En face Ursula Andress n'est guère convaincante, manquant de finesse et d'espièglerie, un peu forcée dans la légèreté.

De Broca commet également l'erreur de traiter sur le même ton rigolard et déjanté la menace du film, que ce soit celle finalement factice de la première partie ou celle plus concrète de la fin avec pour résultat une absence totale de sentiment de danger alors que le héros est poursuivi par une horde de tueurs surarmés. Le recyclage de Tintin est des plus maladroits et grossiers aussi avec les similis Dupont et Dupond joué par Paul Préboist et Mario David (supplantant parfois le bien plus intéressant majordome à la Nestor joué par Jean Rochefort), des atmosphères à la Tintin au Tibet mais sans l'émotion de l'album d'Hergé.

La seule réelle satisfaction sera donc la patte esthétique de De Broca toujours aussi brillante. Le tournage entre le Népal à Katmandou, à Hong Kong puis en Malaisie fut une aventure en soi et ce dépaysement et exotisme se ressent largement à l'écran. Cadrages parfait mettant en valeur les vues de la baie de Hong Kong, vue aérienne du Népal traversé en ballon, scène d'amour sur une île de l'archipel de Langkawi, les rares moments contemplatifs sont de pures merveilles pour les yeux.

Si l'accumulation rend l'ensemble indigeste, prise séparément les scènes d'actions et les nombreux gags qui les parsèment font montre d'une inventivité bluffante. On pense à ce moment où Rochefort et Belmondo sont suspendus à un pont en bois par les chemises de la valise de Bebel formant un nœud ou encore cette folle poursuite (qu'un certain Jackie Chan a certainement dû voir) où notre héros s'agrippe à un échafaudage en bambou tout en affrontant une dizaine d'adversaires. Toutes ces réelles qualités sont malheureusement au service d'un certain vide dont le succès certes réel sera bien moindre que celui de L'Homme de Rio qui aura fait deux millions d'entrées de plus. Premier vrai simili ratage de De Broca, Les Tribulations d'un Chinois en Chine est condamné à rester dans l'ombre de son illustre modèle.

Sorti en dvd zone 2 et bluray chez TF1 vidéo

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