Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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vendredi 31 juillet 2015

La Guerre à sept ans - Hope and Glory, John Boorman (1987)

Début de la Seconde Guerre mondiale. Elle sera vue avec les yeux de Bill, jeune garçon de sept ans qui habite la banlieue de Londres. Le père de Bill s'engage. La mère décide alors d'envoyer ses enfants en Australie. Mais, une fois à la gare, par peur, détresse et amour, elle ne sait plus que faire, et les ramène à Londres. La vie continue, rythmée par les alertes, les bombes, les maisons détruites, l'amour de la fille aînée pour un soldat canadien-français ; la guerre, pour le garçon, ressemble à une grande aventure.

John Boorman avait avec La Forêt d’émeraude (1985) achevé son cycle « mythologique » et son questionnent sur le rapport entre l’homme et la nature, fruit d’expérimentions visuelles impressionnantes dans des films aussi singuliers que Délivrance (1972), Zardoz (1974) et Excalibur (1981). Hope and Glory était donc l’occasion pour le réalisateur de revenir à une veine intimiste et plus spécifiquement anglais abandonnée depuis Leo the last (1970). Boorman se penche ici sur ses souvenirs d’enfance et son quotidien durant la Deuxième Guerre Mondiale avec sa famille. 

La vie paisible du jeune Bill (Sebastian Rice-Edwards) se voit bouleversée lors de l’entrée en guerre de l’Angleterre. A l’instant même de l’annonce radio, le monde de Bill semble basculer et l’Angleterre se transformer. L’ensemble du film joue à la fois sur l’intime et l’universel quant aux conséquences du conflit. La vision bucolique de cette famille unie et heureuse, l’imagerie chaleureuse de leur quartier pavillonnaire de la banlieue de Londres, tout cela va voler en éclat insidieusement. C’est d’abord la cellule familiale qui se transforme avec le la mobilisation du père (David Hayman), sa grande sœur de quinze grandit plus vite que de raison, séduite par un soldat canadien (Jean-Marc Barr) de passage. Les nuits se vivent désormais au rythme des alertes bombardements, le tonnerre des explosions et les flammes infernales  se rapprochent de plus en plus tout en devenant des éléments terrifiant du quotidien.

En endossant le propre regard de l’enfant qu’il était, Boorman parvient pourtant un maintenir une atmosphère ludique et chaleureuse. Le contexte de guerre nourrit ainsi les rêves d’aventures et d’exploits de Bill. Le paysage de désolation et d’apocalypse du quartier réduit à l’état de ruines constituera un formidable terrain de jeu pour notre héros et ses camarades (on peut soupçonner que Boorman s’inspire du formidable Hue and Cry (1947) de Charles Crichton), l’absence du père est compensée par les songes où ils réalisent des exploits aériens face au avions allemands. Dans cette idée, le film s’offre d’excellents moments décalés tel ce pilote allemand parachuté dans la ville et qui attends cigarette aux lèvres et tout sourire d’être arrêté par les policiers locaux apeurés. 

Ce décalage participe aussi à l’émotion forcément plus ténue que dégage les enfants. La maladresse avec laquelle Bill et Sue tente de réconforter une camarade dont la mère est morte dans le bombardement de sa maison serre le cœur autant qu’elle prête à sourire, une invitation à jouer pouvant lui faire oublier. La détresse de Bill lorsque sa propre maison sera détruite est poignante également, le socle de son univers ayant fondu au même titre que ses précieux soldats de plomb. L’innocence est en passe d’être brisée même pour notre héros en culotte courte, mais la famille sera un refuge qui aidera à tout surmonter.

La guerre sert de révélateur également pour les adultes, entre les infidélités de l’épouse des voisins où les regrets nourris par le beau personnage de mère joué par Sara Miles. Là aussi la famille sera le remède à la nostalgie et la solitude, magnifiquement abordé dans la scène où elle change d’avis et préfère braver le danger plutôt que de quitter ses enfants et les envoyer en Australie par sécurité. 

Les rares moments où la famille est réunie et heureuse constitue un aparté, une bulle nostalgique (le grand-père pestant contre les poteaux électriques envahissant champ de vision) où il faut quitter la ville pour se régénérer et retrouver la vie passé aux abords de la Tamise. La traversée du fleuve semble nous faire basculer dans un autre monde où Boorman équilibre l’imagerie élégiaque et chaleur humaine bercée des rires, pleurs et tempérament bougon du grand-père (Ian Bannen génial).

C’est une magie que l’on ne souhaite pas voir s’estomper et qui finit par surmonter le contexte par un coup du sort final qui conclut le film dans un grand éclat de rire qui prolonge indéfiniment les vacances scolaires et le gout de ce paradis perdu. Une ode somme toute logique et sincère pour Boorman (qui au détour de la vue d’une équipe de tournage par Bill affirme sa future passion) qui aura prolongé retranscrit ce cocon familial à l’écran et l’aura reproduit dans son travail (sa fille cadette Katrine Boorman vue en Ygraine dans Excalibur joue une des tantes ici tandis que son aînée Telsche aura été le coach des jeunes acteurs). Ce retour aux sources sera formidablement salué avec 5 nominations à l’Oscar et Boorman lui a donné une belle suite récente avec Queen and Country (2014).

Sorti en dvd zone 2 français chez Sony

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