Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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dimanche 18 octobre 2015

42e Rue - 42nd Street, Lloyd Bacon (1933)

Julian Marsh (Warner Baxter), célèbre producteur de Broadway, lance un nouveau spectacle malgré sa santé fragile. La production est financée par un vieil homme fortuné, amoureux de Dorothy Brock (Bebe Daniels), la vedette de la comédie musicale....

42nd Street marque la première collaboration du chorégraphe Busby Berkeley à la Warner, et dont le succès conjugué à celui de Gold Diggers of 1933 la même année l'imposera à Hollywood. Le film est aussi son premier avec le réalisateur Lloyd Bacon, remplaçant au pied levé Mervyn LeRoy et qui deviendra un complice sur de nombreuses production à venir. Le film (adapté d'un roman de Bradford Ropes) définit l'archétype des comédies musicales dépeignant la confection d'un spectacle. 42nd Street se démarque cependant toujours de ses héritiers par son profond ancrage dans le contexte de la Grande Dépression. Contrairement à l'euphorie de Prologue, Bacon/Berkeley suivant et à la trame voisine, le spectacle n'est jamais une fête dans 42nd Street. Ayant voué son existence et laissé sa santé à Broadway, le metteur en scène Julian Marsh (Warner Baxter) joue son va-tout avec un nouveau spectacle.

Le prestige de ses triomphes passé doit enfin se conjuguer à un succès financier alors que l'on devine qu'il a tout perdu dans le krach boursier. Chacun à leur échelle, cette tension et peur concerne l'ensemble des personnages participant au show. La vedette Dorothy Brock (Bebe Daniels) aura ainsi sacrifiée son seul amour Pat Denning (George Brent) au succès, faisant d'elle le jouet du mécène libidineux Abner Dillon (Guy Kibbee). Cette idée se prolonge à la troupe de danseuses pour lesquels le spectacle représente plus un gagne-pain possible qu'une réelle aspiration artistique. Lloyd Bacon dépeint cela dans un mélange de mélodrame et de vraie trivialité, la séquence d'audition alternant caractérisation truculente des danseuses (Ginger Rogers en tête et castée par Mervyn LeRoy avec lequel elle sortait et qui la dirigera dans Gold Diggers of 1933) et la peur pour la petite chose fragile et innocente qu'est la nouvelle venue Peggy Sawyer (Ruby Keeler).

L'espace de ce monde du spectacle n'est que douleurs, efforts et anxiété entre des danseuses à bout de force et Julian Marsh se désagrégeant tout autant par l'exigence qu'il leur impose. Cela reste pourtant un lieu d'oubli de soi quand l'extérieur n'a que déception à offrir, entre romance triviale/sordide et le vrai déchirement sentimental tel cette séquence ou Pat Denning et Dorothy Brock se séparent presque comme on rompt un contrat par la seule cause de leur trajectoire professionnelle divergente. Leurs émotion trahit pourtant la supposée froideur du procédé et bouleverse par son inéluctabilité. Le seul rayon de soleil, la seule amenant une aura de conte de fée à l'ensemble est Peggy, magnifiquement interprétée par Ruby Keeler. De son engage à son apprentissage ainsi que du final en vedette, tout son parcours relève du miracle transcendant le contexte social difficile. Elle est le moteur faisant dépasser aux autres protagonistes leurs intérêt (le couple Pat/Dorothy) ou leur anxiété (Julian Marsh enfin attachant dans le rush final).

Au contraire de Prologue faisant montre d'une grandiloquence et d'une sophistication qui nous emmènera dans une véritable réalité alternative, les séquences musicales de 42nd restent solidement ancrées au réel. Les passages sur scène alternent avec les coulisses en ébullition (quand le réel s'estompera totalement dans Prologue), les cadrages et la mise en scène laissant d'ailleurs toujours laisser deviner justement que l'on se trouve sur une scène.

Les thématiques des séquences (le mariage et son issue plus ou moins heureuse, la promiscuité des couchettes de train en route pour la lune miel, un meurtre dans une ruelle) prolonge ainsi les angoisses et problématiques des spectateurs tout en insérant le grain de folie de Berkeley (le mouvement de caméra arpentant la ruelle dans la séquence de meurtre, les chorégraphies géométrique) même si la vraie folie et démesure interviendra avec Prologue. Le final avec l'auteur seul face aux réactions de son public et désormais dépossédé de sa création achève de conclure le film loin du happy-end et de la magie associée à Broadway, toujours un pied dans la cruelle réalité.

Sorti en dvd zone 2 français chez Warner 

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